Les spirituals et gospels issus de la culture noire nord américaine sont des incontournables pour le répertoire de beaucoup de chorales. Dès son origine, cette musique s’exprime essentiellement au travers des interprétations en groupe. Dès lors, elles inspirèrent et continuent d’inspirer bon nombre de chœurs qui sont sensibles à ces mélopées souvent très rythmées.
D’emblée, ce sont les racines de cette musique afro-américaine qui entraînent la sympathie. En effet, cette musique prend naissance avec la déportation d’environ 2 millions d‘esclaves dans les colonies d’Amérique du Nord. Soumises à une acculturation intense, ces populations vont créer un pont entre leur culture d’origine et la nouvelle culture qu’on leur impose. Cette confrontation est le point de départ d’une nouvelle forme musicale. Ainsi, celle-ci devient la source de tous les styles qui vont en découler : spirituals, gospels, jazz, blues, soul, rock, pop… Donc, elle repose sur cette capacité du peuple noire nord américain à se réapproprier une culture qu’il est astreint d’adopter. Sans cette potentialité de résilience, tout ce qui fait aujourd’hui l’essence-même de la musique moderne n’existerait sans doute pas.
Spirituals et gospels : entre esclavage et ferveur chrétienne
Avant tout, les conditions de l’esclavage sont extrêmement dures. Notamment, le travail dans les champs de coton est harassant alors qu’il doit être exécuté dans des conditions épouvantables. Pour ces raisons, des chants vont apparaître afin de soutenir le moral de la communauté. Mais, ils vont aussi servir à assurer plus prosaïquement un rythme de travail.
De plus, les noirs en esclavage doivent replacer cela dans le cadre de nouvelles croyances religieuses. Ainsi, ces nécessités donnent naissance à des chants de travail qui intègrent également une dimension spirituelle. De fait, celle-ci permet de faire le lien avec leur propre condition et des espaces qui permettent d’espérer un monde meilleur. Ainsi, dès le XVIIIᵉ siècle et particulièrement dans le courant du XIXᵉ siècle, les negro-spirituals ou spirituals vont fleurir au sein des communautés d’esclaves.
Par la suite, les communautés évangéliques, vont se réapproprier cette culture musicale. À savoir qu’il s’agissait d’utiliser ce vecteur pour faire passer les messages bibliques et évangéliques. C’est ainsi que cette utilisation va conduire à un glissement vers des hymnes qui auront des buts de pédagogie religieuse. À partir de cette mutation, c’est le gospel qui va se développer parallèlement.
Donc entre spirituals et gospels, il existe des liens très étroits, mais aussi quelques différences en termes d’origine et d’objectifs.
Les Spirituals et les Chants de travail
En fait, le but de cet article est de permettre l’exploration de ce répertoire des spirituals et gospels pour les chorales. D’abord, voici quelques exemples de chants que l’on peut verser plus particulièrement dans le registre des spirituals et chants de travail.
- Nobody knows the trouble I see – Ce chant est sans doute un des plus anciens. Religieusement, il doit être compris comme une incantation pour être délivré de ses péchés. Mais en seconde lecture, il peut tout aussi bien parler de la délivrance des conditions de l’esclavage.
- Go down Moses – Aussi connu sous le titre « Let’s my people go« , ce chant qui pouvait aussi se chanter en rythme au travail est sans doute encore plus explicite. En effet, faisant référence au peuple juif captif du Pharaon en Égypte, il exprime ce désir d’être délivré et de revenir sur les terres des origines.
- Swing low, sweet chariot – Sur un rythme plus calme, ce spiritual traduit la nostalgie du retour à la maison. Une autre manière de traduire à nouveau cette aspiration à sortir de l’esclavage.
- When the saints go marching in – Un spiritual très connu, rendu très populaire par Louis Armstrong. Cette marche vers la sainteté peut être aussi comprise comme une marche vers la liberté. Raison pour laquelle, ce chant accompagnera aussi les marches pour les droits civiques.
- Jump down – Parfois aussi appelée « Pick a bale of cotton« , cette mélodie est typiquement un chant de travail. Avec sa cadence qui peut être accélérée, elle donne le rythme au travail. De facto, elle traduit les conditions de travail des esclaves.
Le glissement vers le Gospel
Donc, le gospel va répondre au besoin d’utiliser la tradition des spirituals pour faire passer des messages bibliques et évangéliques :
- Lord I want to be a Christian – Ce chant est un bel exemple de ce glissement. Musicalement, il est encore assez proche du spiritual traditionnel. Mais, son message est focalisé sur les caractéristiques du bon chrétien. En cela, il se situe dans la veine du gospel.
- Joshua fought the battle of Jericho – Voici sans doute un des gospels les plus connus. Comme le « Go down Moses« , il relate un épisode héroïque de la bible, au travers duquel la foi chrétienne peut s’exprimer.
- Amazing grace – Chant empreint de ferveur et de foi, cet « Amazing grace » est devenu en Amérique du Nord, le chant d’action de grâce par excellence.
- Oh happy day – De composition beaucoup plus récente, ce grand succès commercial montre à suffisance que le gospel reste un genre encore bien vivant. Ce chant fait référence à la venue de Jésus pour laver nos fautes.
Nul doute que l’un ou l’autre de ces spirituals et gospels trouveront place dans les répertoires pour nombre de chorales.
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